EDIT du 22/02/16 : Lorsque je me suis lancée dans la traduction début 2012, j’ai effectué diverses traductions de façon bénévole afin de « faire mes armes » et de me construire un portfolio. Cet article, destiné aux jeunes traducteurs et aux étudiants, vise à faire partager mon expérience et mes conseils, mais en aucun cas à promouvoir des services de « traduction bénévole » ! Aujourd’hui, mes obligations professionnelles et familiales ne me laissent plus de temps pour le bénévolat, et je travaille uniquement sur des projets rémunérés.

Ces dernières semaines, plusieurs blogs de traducteurs ont publié des articles sur les opportunités de bénévolat en traduction. Proposer ses services comme traducteur bénévole est en effet une excellente occasion d’acquérir de l’expérience et de se construire un portfolio : l’idéal quand on débute dans la profession et que l’on manque de références. À condition toutefois de respecter quelques règles…

Solidarité

Traduisez sérieusement

Ce n’est pas parce que votre travail ne sera pas rémunéré qu’il faut le prendre à la légère ! Faites preuve du même sérieux que s’il s’agissait d’un « vrai » client : qualité de la traduction, respect des délais…

  • La structure qui fait appel à vos services compte sur votre traduction. En acceptant, vous prenez un engagement. Rendre un travail de mauvaise qualité, ou en retard, peut porter préjudice à votre commanditaire. Ce n’est pas plus acceptable que pour un client « payant ».
  • Si vous traduisez pour vous entraîner, prenez tout de suite de bonnes habitudes ! Vivez cette expérience comme une mise en situation professionnelle. Des délais imposés, parfois assez courts, font partie de l’exercice : ils seront votre quotidien quand vous traduirez professionnellement, alors autant vous habituer dès que possible à en tenir compte. Vous apprendrez ainsi à mieux vous organiser.
  • Votre crédibilité et votre image sont en jeu. Si vous rendez un travail bâclé, comment voulez-vous que cela vous serve de référence par la suite auprès d’un client potentiel ?

Ne vous faites pas exploiter

Fixez certaines limites, pour que bénévolat ne rime pas avec exploitation.

  • Un bénévole, ce n’est pas de la main d’œuvre gratuite. Sélectionnez soigneusement les structures auxquelles vous offrez vos services. Soyez bénévole pour un projet participatif, une association ou une ONG, pas pour une entreprise !
  • Travailler bénévolement ne signifie pas être corvéable à merci ! Textes de 60 pages, délais déraisonnables : passez votre chemin.
  • Exploitation ou pas ? En cas de doute, suivez cet excellent conseil de Marta Stelmaszak : assurez-vous que votre « client » ne va pas retirer de profit financier de votre traduction.

Soyez intéressé !

J’ai lu et entendu à plusieurs reprises qu’un travail bénévole devait être complètement désintéressé, sous peine de n’avoir aucune valeur… Je pense au contraire que tout travail mérite reconnaissance !

  • Si l’objectif est de vous entraîner, demandez des commentaires sur votre travail. Cela vous permettra de repérer vos erreurs, de progresser, et d’évaluer la qualité de vos traductions.
  • Ne restez pas anonyme ! Assurez-vous par exemple que votre nom sera cité. Sinon, comment pourrez-vous utiliser vos traductions comme références ?
  • Faites-vous plaisir ! Traduisez des textes qui vous intéressent, pour des causes auxquelles vous croyez. Votre travail n’en sera que plus épanouissant et de meilleure qualité.

Personnellement, j’ai choisi depuis quelques mois d’être traductrice bénévole pour le site cafebabel.com, magazine européen d’actualité en six langues. Les thématiques sont variées, les articles intéressants, avec une ouverture sur toute l’Europe. J’adhère totalement au concept de site collaboratif, et j’apprécie le sérieux des rédacteurs en chef : les bénévoles sont invités à ne traduire que dans leur langue maternelle, les traductions sont révisées avant d’être mises en ligne, et les traducteurs reçoivent la version révisée accompagnée de commentaires constructifs. Et les articles en ligne mentionnent systématiquement le nom de l’auteur et du traducteur. Des textes passionnants et une vraie reconnaissance de votre travail, que demander de plus ?

Et vous, vous arrive-t-il de traduire bénévolement ? Quelles sont vos règles d’or ?

 

Pour aller plus loin, et trouver des opportunités de bénévolat en traduction :

 

13 Comments
  1. Bravo pour ce blog, et cet article très utile.
    Je note que cafebabel.com cite le nom du traducteur, ça me semble important aussi.
    « Tout travail mérite reconnaissance » j’approuve absolument !
    Bonne continuation

  2. Vous êtes de bons conseils, Jeanne 🙂

    J’ai fait un peu de traduction bénévole et mes seuls critères de sélection, outre mon intéret pour la cause, étaient que le client indique mon nom et mes coordonnées dans son matériel et qu’il n’exige pas le même genre de délai de remise que pour un travail rémunéré.

  3. Merci Sophie, j’espère en effet que les traducteurs (notamment débutants comme moi) le trouveront utile !
    Ton commentaire me fait d’autant plus plaisir que je suis ton blog avec intérêt depuis quelques mois 😉

  4. Intéressant ! Cela veut dire que Café BABEL a évolué !
    J’ai tenté cette expérience l’année dernière.
    L’article que j’avais choisi (« La grande Bretagne défie la Cour européenne des Droits de l’Homme »), comportait une erreur de taille (« détenus depuis moins de 4 ans » au lieu de « détenus condamnés à des peines de moins de 4 ans » – j’ai découvert la vérité en allant à la source, parce que l’argumentaire n’avait pas de sens). J’ai envoyé ma traduction à la rédaction en signalant l’erreur. Non seulement elle n’a pas été publiée (j’ai suivi le site pendant les 3-4 mois suivants), mais je n’ai même pas eu de réponse.
    Par ailleurs, quand on lit dans leur présentation (http://www.cafebabel.fr/about/cafebabel/) que Cafebabel offre « à tous la possibilité de s’exprimer dans sa langue maternelle », on peut légitimement se demander s’il y a au moins une relecture.
    Bon courage !

    • @ Frédéric : Merci pour votre commentaire, c’est intéressant de connaître les expériences d’autres traducteurs à ce sujet ! J’ai aussi effectué des traductions bénévoles avec des délais très confortables (2 semaines), et la première fois que j’ai dû faire face à un délai vraiment court, cela m’a fait hésiter… J’ai finalement accepté, et je ne l’ai pas regretté car cette contrainte, à laquelle je n’étais pas habituée jusque là, m’a en fait permis de tester mes capacités à travailler « dans l’urgence », à aller à l’essentiel, à mobiliser d’autres ressources… C’était une expérience très riche pour une débutante !
      Cela dit, j’imagine qu’avec plus d’expérience j’agirai un peu comme vous. Après tout, ce serait dommage de devoir refuser un « vrai » travail parce que l’on est trop occupé par une traduction bénévole…

      @ Diana : Je suis désolée que l’expérience se soit mal passée pour vous ! Il est effectivement possible qu’ils aient changé leur mode de fonctionnement entre-temps, je vais leur poser la question. Pour tout dire, ma collaboration avec cafebabel a démarré sur un quiproquo dû à un problème technique ! Le rédacteur en chef, très ennuyé, m’a envoyé un message pour s’excuser… Mais par la suite, ça s’est toujours bien passé.
      Il m’est aussi arrivé de trouver des erreurs dans les textes que je traduisais (soit sur le fond, soit sur la forme). Certains articles sont écrits en anglais alors que ce n’est pas la langue maternelle de l’auteur, soit parce que la langue de l’auteur ne fait pas partie des 6 langues de travail du site, soit parce qu’il s’agit d’une interview dans laquelle le journaliste et l’invité ne parlent pas la même langue, et que l’anglais est alors la langue d’échange. Il faut alors composer… et ça aussi, c’est une bonne expérience ! (Quel traducteur professionnel n’a jamais été confronté à un texte source de qualité discutable ?)
      En tout cas, je vous remercie pour votre témoignage et vos encouragements !

  5. Oups… Tout travail mérite reconnaissance, alors je m’empresse de réparer un énorme oubli : un immense merci à Sophie et son excellent blog http://www.traduction-pro.eu/bahan/ qui développe parfaitement le thème des dons intéressés ou désintéressés ! 🙂

  6. Très bel article, concis, clair, précis. Merci beaucoup pour la référence. Et j’invite chacun d’entre vous à venir participer à l’aventure babélienne qui depuis 11 ans maintenant vivote grâce aux traducteurs bénévoles. Sûr que ce texte leur fait crédit.

    @Diana : Je te propose de retenter l’expérience ! Si un problème est survenu, il devait être technique parce qu’en temps normal, nous répondons toujours aux sollicitations de nos volontaires. Au plaisir, donc, de te lire.

    • Merci beaucoup Matthieu ! Le fait que tu aies pris la peine de venir réagir ici me confirme que la relation de cafebabel avec ses traducteurs n’est pas une relation à sens unique, et qu’il y a au contraire un vrai respect et un réel échange. Et ça aussi, ça compte dans la reconnaissance du travail des bénévoles ! 🙂

  7. @Matthieu : Je ne veux pas mettre de l’huile sur le feu, mais puisque tu insistes… je vais juste dire que ce n’était pas la première fois que vous n’avez pas répondu à un mail. Pour la traduction, ce n’est pas grave, je suis plus riche avec les choses que j’ai apprises. Bonne continuation !

  8. Pour un autre aperçu de la traduction « bénévole », beaucoup plus humoristique, allez faire un tour sur le bog de Mox : http://mox.ingenierotraductor.com/2012/02/translating-pro-bono.html 😀

  9. je voudrais faire traduire mon livre de 580 pages sans payer un coût exorbitant, est-ce possible?

  10. Bonsoir,

    Si le livre que vous souhaitez faire traduire est destiné à être édité, sachez que la traduction d’édition est soumise à des règles bien particulières (notamment une rémunération en droits d’auteur).

    Par ailleurs, vous devez savoir que traduire un livre de 580 pages représente un travail de plusieurs mois. Cela a forcément un certain coût, surtout pour obtenir une traduction de qualité.

    En toute honnêteté, je doute fort qu’un traducteur compétent accepte de traduire un pareil volume gracieusement ou à prix « bradé ». Personnellement, je refuserai catégoriquement, même 50 pages et même si c’était à la demande d’un ami ou d’une ONG défendant une cause à laquelle je crois.